Rôle et responsabilités du juge

Pour être admissible à la fonction de juge ou juge de paix magistrat (ci-après « juge Â»), la loi exige qu’une personne ait exercé la profession d’avocat ou de notaire pendant au moins dix ans ou, encore, qu’elle ait acquis une expérience juridique équivalente.

 

La procédure de sélection des juges inclut plusieurs critères dont un comité doit tenir compte pour évaluer les candidats :

 

  • les compétences du candidat, comprenant :
    • ses qualités personnelles et intellectuelles, son intégrité, ses connaissances et son expérience générale;
    • le degré de ses connaissances juridiques et son expérience dans les domaines du droit dans lesquels il serait appelé à exercer ses fonctions;
    • sa capacité de jugement, sa perspicacité, sa pondération, sa capacité d’établir des priorités et de rendre une décision dans un délai raisonnable ainsi que la qualité de son expression;
  • la conception que le candidat se fait de la fonction de juge;
  • la motivation du candidat pour exercer cette fonction;
  • les expériences humaines, professionnelles, sociales et communautaires du candidat;
  • le degré de conscience du candidat à l’égard des réalités sociales;
  • la reconnaissance par la communauté juridique des qualités et des compétences du candidat.

 

Selon les besoins de la région où le poste de juge est affiché, la maîtrise de la langue anglaise peut également être exigée.

Avis de sélection

Lorsqu’un poste de juge est vacant à la suite, par exemple, d’un départ à la retraite, un avis est affiché sur les sites Internet du ministère de la Justice, du Barreau du Québec et de la Chambre des notaires du Québec. Les candidats ont généralement un mois pour manifester leur intérêt auprès du Secrétariat à la sélection des candidats à la fonction de juge du ministère de la Justice du Québec.

 

Tous les postes vacants sont affichés sur le site Internet de la Cour du Québec.

 

Comité de sélection

Un comité de sélection de cinq personnes est ensuite formé pour analyser les dossiers des candidats et recevoir chacun de ceux-ci en entrevue. Le comité est présidé par un juge de la Cour. Un membre est désigné par le bâtonnier du Québec, soit un avocat et un professeur d'une faculté de droit du Québec. Le président de la Chambre des notaires du Québec désigne un notaire ou un professeur d'une faculté de droit du Québec. Une personne qui n'est ni juge ni membre du Barreau du Québec ou de la Chambre des notaires du Québec est désignée par le président de l'Office des professions du Québec. Pour un poste de juge affecté à la Chambre criminelle et pénale, le ministre de la Justice désigne une personne oeuvrant dans un organisme qui a pour objet d'aider les personnes victimes d'infractions criminelles, après consultation de tels organismes. Pour un poste de juge qui n'est pas affecté à la Chambre criminelle et pénale, le président de l'Office des professions du Québec désigne une deuxième personne qui n'est ni juge ni membre du Barreau du Québec ou de la Chambre des notaires du Québec.

 

Les membres du comité de sélection reçoivent une formation particulière avant d’entreprendre le processus d’entrevues.

 

Un règlement énumère les critères dont le comité doit tenir compte pour évaluer les candidats[1].

 

Rapport au ministre

Après avoir reçu tous les candidats, le comité prépare un rapport dans lequel il indique, par ordre alphabétique, les noms des trois meilleurs candidats qu’il propose pour le poste à pourvoir. Lorsque 3 candidats ou moins soumettent leur candidature pour un poste, le comité l’indique au rapport et propose chaque candidat. Si le ministre ne peut choisir l’un de ces candidats en vue d’une recommandation au Conseil des ministres, le concours est annulé à l’égard de ce poste. Le rapport inclut une appréciation personnalisée de chaque candidat proposé.

 

Le ministre de la Justice reçoit le rapport et choisit un candidat dans la liste des personnes proposées par le comité de sélection. Il soumet ensuite sa recommandation au Conseil des ministres.

 

La loi prévoit spécifiquement que l’allégeance politique ne doit pas être considérée par le comité, non plus que par le ministre dans le choix du candidat qu’il recommande au Conseil des ministres.

 

Confidentialité

Le nom des candidats à un poste de juge, le rapport du comité de sélection, la liste des candidats proposés ainsi que les documents se rattachant à une candidature sont confidentiels.

 

 


[1] Voir la section sur les conditions pour devenir juge ou juge de paix magistrat.

Les juges de la Cour du Québec peuvent exercer l’ensemble des compétences de la Cour, quelle que soit la chambre à laquelle ils sont affectés (Chambre civile, Chambre criminelle et pénale ou Chambre de la jeunesse). Dans les faits, les juges des grandes régions urbaines, par exemple Montréal, Longueuil, Saint-Jérôme, Laval, Trois-Rivières et Québec, siègent généralement à une seule des trois chambres de la Cour.

 

Les juges de paix magistrats de la Cour du Québec ont le pouvoir d’exercer certaines des attributions des juges de la Cour dans les matières criminelle et pénale. Ils assument ces responsabilités au même titre que le fait un juge de la Cour du Québec.

 

En savoir plus sur les fonctions des juges de paix magistrats

Les juges de paix magistrats président des procès à la suite de poursuites engagées en vertu d’une centaine de lois, dans des domaines aussi variés que la santé et la sécurité du travail, la protection de l’environnement, l’exercice illégal d’une profession, les valeurs mobilières et la sécurité routière. Ils ont aussi compétence pour traiter des demandes d’autorisation judiciaire dans le cadre d’une enquête (ex. : un mandat de perquisition). Pour assumer cette responsabilité, le travail des juges de paix magistrats est organisé de façon à ce que leurs services soient accessibles en tout temps, chaque jour de l’année, au palais de justice ou à distance.

 

Quelques-unes des caractéristiques communes aux juges et juges de paix magistrats

Procédure de sélection

Avoir été membre du Barreau du Québec pendant au moins 10 ans / mêmes critères de sélection pour évaluer les candidats

Garantie d’inamovibilité

Nomination durant « bonne conduite Â» / destitution seulement sur rapport de la Cour d’appel fait après enquête, sur requête du ministre de la Justice

Autorité de la juge en chef

-La juge en chef coordonne, répartit et surveille leur travail

-Tous doivent se soumettre aux ordres et directives de la juge en chef

Territoire couvert

Compétence sur tout le territoire du Québec

Règles de déontologie

Respect du même Code de déontologie de la magistrature (incluant des devoirs d’impartialité, d’objectivité, de réserve et de courtoisie)

Fonctions incompatibles

Exercice exclusif des fonctions, sous réserve de quelques exceptions, dont l’enseignement (avec le consentement de la juge en chef)

Perfectionnement

Bénéfice des mêmes programmes de perfectionnement permettant la mise à jour constante des connaissances juridiques

Âge de la retraite obligatoire

70 ans – possibilité de suppléance par la suite

 

En savoir plus sur les obligations déontologiques des juges

Le Conseil de la magistrature du Québec existe depuis 1978. Il est chargé principalement de veiller au bon comportement des juges et de développer pour eux des activités de perfectionnement.

Le Conseil s'occupe uniquement des juges nommés par le gouvernement du Québec. Il est composé de 16 membres, dont 11 juges, un juge de paix magistrat, deux avocats et deux membres du public. 

Pour consulter le site Internet du Conseil de la magistrature, cliquez ici.

 

Selon la loi, l’âge de la retraite obligatoire d’un juge est de 70 ans. Un juge retraité peut toutefois être autorisé, pour une certaine période donnée, à continuer d’exercer ses responsabilités après 70 ans à titre de « juge suppléant Â».

 

En moyenne, la Cour du Québec compte une soixantaine de juges suppléants qui siègent dans toutes les régions du Québec.

 

Les juges suppléants ont tous les pouvoirs de leurs collègues « actifs Â» et assument les mêmes responsabilités. Ils sont également soumis aux mêmes obligations déontologiques. Leur apport est précieux en ce que, par exemple, il permet de pallier l’absence d’un juge pour cause de maladie ou ayant quitté pour la retraite.

La Cour du Québec est composée de 319 juges et 39 juges de paix magistrats ; la parité hommes / femmes est aujourd’hui généralement maintenue au fil des départs à la retraite et des nominations. Le nombre de femmes a constamment augmenté ces dernières années :

 

 

Femmes

%

Hommes

%

Total

2012

124

41 %

180

59 %

304

2013

134

42 %

183

58 %

317

2014

141

45 %

175

55 %

316

2015

144

45 %

176

55 %

320

2016

149

47 %

170

53 %

319

2017

163

48 %

179

52 %

342

2018

168

49 %

175

51 %

343

2019

168

49 %

172

51 %

340

2020

169

49 %

173

51 %

342

2021

171

51 %

166

49 %

337

La mission première du juge est de rendre justice dans le cadre du droit. Les juges sont ainsi chargés d’analyser et d’interpréter les lois pertinentes et de les appliquer aux faits qui leur sont soumis. Ainsi, le juge :

 

  • décide des litiges entre les citoyens ou entre l’État et un citoyen ;
  • tente de concilier les parties lorsque les circonstances s’y prêtent (en matière civile et jeunesse notamment) ;
  • écoute les parties, les témoins et les avocats, dirige les débats et attribue les droits de parole ;
  • analyse la preuve qui lui est soumise, ce qui inclut une évaluation de la crédibilité des témoins entendues lors de l’audience ;
  • pose des questions pour clarifier certains aspects de la preuve par exemple ;
  • décide si des éléments de preuve sont admissibles ou non ;
  • rend ses décisions oralement ou par écrit.

Au-delà du rôle traditionnel du juge

Il s’agit là du rôle que l’on pourrait qualifier de « traditionnel Â» du juge. Il faut savoir que plusieurs juges de la Cour du Québec participent régulièrement à des activités d’information juridique destinées au public, par exemple à propos des petites créances. D’autres encore se rendent dans des écoles et président des procès simulés, une occasion pour les étudiants de se familiariser avec certaines notions juridiques.

 

Bien sûr, les interventions des juges sont limitées par leur devoir de réserve. Ils ne peuvent donc, à titre d’exemple, donner un conseil juridique sur une situation particulière.

 

Les juges participent toujours avec enthousiasme à l’effort d’éducation juridique des citoyens, un besoin bien réel à satisfaire puisque le droit touche toutes les facettes de la vie en société – ou presque !

  • Il ne choisit pas les causes qu’il entend.
  • Il ne formule jamais d’accusation.
  • Généralement, il ne procède pas lui-même à l’enquête, laissant aux parties ou à leurs avocats le soin de présenter devant le tribunal les faits et les preuves nécessaires.
  • Il n’écrit pas les lois non plus qu’il les modifie, une tâche qui appartient plutôt au Parlement.
  • Il ne voit pas à l’exécution des décisions qu’il rend.

La prise de décisions en matière judiciaire est un processus structuré et analytique qui repose sur :

 

  • la preuve des faits, établie notamment par des déclarations assermentées, des documents, des éléments matériels ou des témoignages;
  • la loi et les règlements en vigueur;
  • la jurisprudence et la doctrine :
    • la « jurisprudence Â» signifie l'ensemble des décisions rendues par les tribunaux sur une même question ou des questions similaires;
    • la « doctrine Â» comprend les articles, revues ou ouvrages juridiques;
  • un degré de preuve plus exigeant en matière criminelle (hors de tout doute raisonnable) qu'en matière civile (balance des probabilités).

NON.

  • Les décisions peuvent être sujettes à appel ou révision judiciaire, selon le cas. Par contre, les décisions d'un juge en matière de petites créances sont sans appel (article 564 du Code de procédure civile).
  • Le tribunal d'appel ou de révision peut modifier la décision et même ordonner, en matière criminelle, la tenue d'un nouveau procès.

 

  • Le juge doit accorder à chaque cause qui lui est soumise une période de réflexion suffisante pour bien analyser tous les éléments pertinents et rendre une décision éclairée; on appelle cette période de réflexion « période de délibéré Â».
  • Le juge rend habituellement sa décision assez rapidement et, parfois même, à l'audience ou dans les jours qui suivent.
  • Certaines causes requièrent une période de délibéré plus longue pour permettre au juge d'analyser tous les éléments pertinents et examiner les règles de droit qu'ils soulèvent.
  • Par exception, dans certaines matières, des délais sont prévus dans la loi.
  • Le juge peut rendre sa décision oralement ou par écrit sauf si la loi exige que la décision soit écrite.

En savoir plus sur les délais pour rendre jugement

Le Code de procédure civile précise un certain nombre de délais à l’intérieur desquels le jugement doit être rendu en matière civile (article 324). En matière de petites créances par exemple, il est de quatre mois.

De même, la Loi sur la protection de la jeunesse prévoit que la décision ou l’ordonnance du juge doit en principe être consignée par écrit dans les 60 jours de la date où elle est rendue à l’audience ou de la date de la prise en délibéré (article 90).

 

L’indépendance des juges est un élément fondamental de notre société démocratique. Ce principe, protégé par la Constitution canadienne, s’applique à tous les tribunaux judiciaires. L’une des caractéristiques de l’indépendance de la magistrature est l’inamovibilité, c’est-à-dire que les juges sont nommés durant « bonne conduite Â» et ne peuvent donc être destitués que pour cause grave au terme d’un processus prévu dans la loi.

 

Cette indépendance est étroitement liée à la séparation des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire de l’État. C’est dire, notamment, que la Cour du Québec est une institution distincte du gouvernement, dont le ministère de la Justice.

 

L’indépendance judiciaire existe au bénéfice du public, et non du juge. Elle est essentielle au maintien de la confiance des citoyens dans leur système judiciaire, puisqu’elle est l’une des garanties que les juges appliqueront le droit sans crainte et à l'abri de toute pression ou ingérence de quiconque. En bref, le juge n’a rien à gagner ou perdre, quelle que soit l’issue de l’affaire qu’il a tranchée.

 

L’impartialité et la neutralité judiciaires exigent que le juge aborde chaque affaire, en fait et en apparence, avec un esprit ouvert, sans parti pris, préjugés ou suppositions.

 

En savoir plus sur l’indépendance judiciaire

Visionnez la vidéo de l’Association du Barreau canadien : https://www.cba.org/For-The-Public/Judicial-independence?lang=fr-ca&utm_source=CBA&utm_medium=CBA-slider&utm_campaign=JudicialIndependence

 

Le Conseil de la magistrature est l’organisme chargé de recevoir et d’examiner toute plainte portée contre un juge de nomination provinciale. Les règles déontologiques auxquelles sont assujettis les juges reposent sur ces trois principes fondamentaux : l’indépendance, l’intégrité et l’impartialité. Elles encadrent le comportement des juges de façon à ce que leur conduite ne mette pas en péril la confiance du public envers les tribunaux.

 

Pour en savoir plus sur la déontologie judiciaire

Consultez La déontologie judiciaire appliquée des professeurs Pierre Noreau et Emmanuelle Bernheim en cliquant ici.